Noms de Familles et Noms de Lieux

Noms de Familles et Noms de Lieux

Des consonances étrangères, et pourtant...

Au sujet de ce nom, nous avons rencontré les hypothèses les plus diverses.

Marie-Thérèse Morlet, dans son Dictionnaire étymologioque des noms de famille, y voit un nom corse au sens de  « fils du Maure ». Mora corse serait un abrègement de Moracchini ou Morachini, nom bien connu sur l’Ile de Beauté, dérivé de Moro « maure ».

On a pu y voir un nom espagnol. « (Fils) du Mora » se rattacherait à un nom de famille issu d’un nom de lieu bien connu en Espagne et au Portugal.

 

 

Un nom gascon

 

S’il est incontestable que Mora est un nom de famille espagnol, il faut toutefois remarquer que DUMORA est un nom de famille qui, sur 1079 naissances au siècle dernier (1891-1990), en a 620 dans la Gironde, 195 dans les Landes et 88 dans les Pyrénées-Atlantiques et que partout ailleurs sa présence n’est due qu’à un facteur migratoire interrégional.

Nous alignerons ce nom sur certains autres noms de familles gascons.

Ainsi de :

Dubroca, Dubroqua  (Landes, Gironde, Pyrénées-Atlantiques) : de broca  « éperon rocheux ».

Dubrana (Lot-et-Garonne, Gironde, Landes) : du branda > brana (où nd passe à n en gascon) au sens de  « bruyère, terre où pousse la bruyère ».

Dutasta (Gironde) : de Tasta, hameau de la commune de Bruges (Gironde).

Il apparaît avec quelque évidence que le nom de famille Dumora est à interpréter comme étant originaire du lieu du mora.

On retrouve Mora avec sa,  formation typique du gascon  (sa casa, la maison).

Procédant différemment que l’ancien français et l’ancien occitan ayant adopté pour article défini les produits el, li, lo, la du démonstratif latin ille, illa, illum, illam, l’ancien gascon a usé du produit du démonstratif ipse, ipsa, en latin classique « lui-même, elle-même », ayant pris le sens de « celui-là même, celle-là même » : ipse a donné es pour le masculin ; ipsa a donné sa pour le féminin.

  

Le féminin sa est bien connu dans de multiples patronymes qui conservent cet article  précédant le substantif généralement dans sa forme ancienne occitane non francisée.

SACARRÈRE (Haute-Garonne), pour la carrèra, la voie charretière, la grand’route, la grand’rue.

SACAZE (Haute-Garonne, Pyrénées-Atlantiques), équivalent de Lacase, la grande maison.

SAPORTE, SAPORTA (forme graphique occitane), SASPORTAS (forme graphique occitane au pluriel sas portas = las portas) : au sens de  « la porte, les portes ».

SAROCCA (Gers), SARROCA, sa ròca = la ròca « la roque : rocher ou château ».

On pourrait en citer bien d’autres.

A la suite de ceci, il est intéressant de noter qu’il existe le nom de famille SAMORA : 65 naissances au siècle dernier (1891-1990) dont 35 dans les Pyrénées-Atlantiques, 8 dans l’Ariège et 7 dans la Haute-Garonne.

 

 

Question de sens

 

DUMORA et SAMORA suffisent, comme nous l’avons vu, à considérer ces patronymes comme gascons.

Par contre, la question du sens sera plus difficile à aborder.

Samora peut permettre de restituer la mòra : la mure, le fruit de la ronce, où le singulier a valeur de collectif pour désigner un lieu de ramassage de ce fruit.

Dumora peut intriguer par la présence d’un du masculin avec un terme féminin.

Or nous avons vu ci-dessus que des termes du genre féminin s’accommodaient très bien de la préposition masculine : du bròca, du brana.

Il faut penser, dans ce cas, que la préposition masculine ne s’adresse pas directement à la mure, au piton rocheux ou à la bruyère, mais au lieu de ramassage des mures, au lieu où se trouve le piton rocheux et au lieu où se trouve la bruyère.                                                                                                                                                

 

 

 

 

 



23/12/2014
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